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Sélim Nassib
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Entre un père joueur de poker et une mère timide, Youssef vit à Beyrouth dans un monde imprégné de sensualité et de mystère. Les mélodies de l'hébreu qu'il entend chez lui se mêlent aux sonorités de la rue arabe. La crise de Suez n'est encore qu'une lointaine rumeur. Ce qui l'occupe, c'est l'éveil au sexe, le tumulte de peur et de désir qu'il sent monter en lui.
Vingt ans après, en Mai 68, il s'engage en politique pour rencontrer des filles. Mais l'Histoire le prend au sérieux. Il se retrouve en prison et découvre qu'une véritable guerre civile coule dans les entrailles du pays.
Lorsque l'armée israélienne envahit le Liban pour en chasser les combattants palestiniens, il quitte Paris où il est devenu journaliste et revient à Beyrouth couvrir de l'intérieur le siège de sa ville. Dans les rues dévastées et les immeubles éventrés par la guerre se renouent les fils de son destin.
Chant d'amour pour une ville mythique, Le Tumulte décrit magistralement le mélange de tragique et de picaresque qui colore l'un des derniers grands conflits du vingtième siècle. -
« Il s'installe sur le palier, encerclé par les chaussures à réparer. Les rides se perdent sur son visage, il garde les yeux baissés. Ses mains sont longues et larges, elles bougent toutes seules, on voit les veines sombres qui serpentent sous sa peau. Il serre le cuir ruisselant contre son tablier, en amoureux, et lui coupe la gorge en même temps. Son couteau aiguisé fait dans la matière un bruit mat, attirant. D'une petite boîte ronde, il prend une petite poignée de clous qu'il met dans sa bouche, des clous à têtes rondes et plates qu'il avale. Il se laisse conduire comme les aveugles par le toucher. L'une de ses mains lève le marteau, l'autre exécute un rapide aller-retour. Un clou est apparu dans un pli de sa lèvre, il est passé entre ses doigts, frappé d'un coup unique, enfoncé dans la profondeur du cuir. Un autre suit aussitôt. Maman sort sur le palier et me prend par le bras. - Ne reste pas là. C'est un Palestinien. Une ombre passe dans son regard, je suis sur la piste. Ce cordonnier sans yeux fait partie de la nébuleuse dont il faut avoir peur. Je tiens une fraction du mystère, je ne le lâcherai pas. »
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« Elle chanta avec une telle ferveur que ça provoqua une émeute. Je n'avais jamais entendu une ovation pareille, aussi sauvage. Sa voix avait touché le point qui libérait la douleur. C'était terrible parce que cette douleur était la mienne, elle l'avait comprise en un éclair, elle la rendait, ma propre tristesse, criée en place publique, rencontrant un incroyable écho. Chacun des hommes dans la salle devenait moi, chacun avait bu à la source et se tordait d'un amour impossible à quitter. Ça dépassait le cercle amoureux, ou alors tout était cercle amoureux, notre situation, l'époque, l'Égypte entière. » Écrit à la première personne, ce roman est librement inspiré de la vie du poète Ahmad Rami, mort en 1981, qui a éperdument aimé Oum Kalsoum et écrit 137 des 283 chansons qu'elle a interprétées. Pendant plus de cinquante ans, cet amour s'est confondu avec celui que le monde arabe a porté et porte encore à sa plus grande chanteuse.
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« Vous avez jeté des pierres, je n'ai rien dit, vous avez tiré sur des enfants, j'ai fait comme si je ne voyais pas, vous avez mis le feu à des pneus, imposé le couvre-feu, cassé des pare-brise, inondé des rues de gaz lacrymogènes, je ne me suis jamais mêlé de vos histoires. Les juifs, vous allez chez le coiffeur juif, les Palestiniens, chez un coiffeur palestinien, mais pour la photo, vous venez tous chez moi, Hagop-photo à Jérusalem, circoncisions, baptêmes, bar-mitsvah, retours de Hajj, mariages, identité, je vous connais, je vois vos têtes mieux que vous, des têtes d'assassins, vous avez changé. » Quatorze contes dans l'Orient d'aujourd'hui. Les personnages de l'Homme assis avancent et le monde se refuse à eux, mystérieusement. Ils vivent une passion, se cognent à tous les murs mais ne renoncent pas.
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Gamin, Menahem Lang était considéré comme un enfant prodige dans sa ville natale de Bneï Brak, au nord-est de Tel-Aviv, dont les 180 000 habitants sont quasiment tous juifs ultra-orthodoxes. " La ville des hommes en noir ", comme on l'appelle, s'extasiait devant la voix exceptionnelle que l'Eternel lui avait donnée pour moduler le hazanout (chant religieux). Mais l'enfant au sourire clair cachait un secret que personne ne voulait entendre : il avait été violé par des membres de cette communauté qui l'adulait.
Sélim Nassib a suivi Menahem de retour à Bneï Brak sur les lieux du crime dont il a été victime. L'histoire de Menahem sera le fil rouge déroulé par Sélim Nassib dans cette communauté secrète, une communauté régie par ses lois et ses rituels, bercée par ses chants et ses danses et organisée en dynasties dirigées chacune par un grandrabbin n'ayant de comptes à rendre qu'à Dieu.
Ces harédim (les " craignant-Dieu ") n'ont accès ni à la télé, ni à la presse, ni à Internet. Ils n'ont pas davantage l'occasion de parler avec des gens venus de l'extérieur. Mais quand ils le font, ils ne savent pas ce qui se dit et ce qui ne se dit pas, de sorte que leur parole est extraordinairement libre. Ils abordent la sexualité, le viol ou la corruption avec une sincérité confondante. Et leur parole ouverte se révèle comme le meilleur remède à la loi du silence qui protège trop souvent les criminels.
Juif et arabe, journaliste, écrivain et scénariste, Sélim Nassib a collaboré à différents journaux (Libération, Le Monde diplomatique, El Pais...), et signé plusieurs romans et récits dont L'Homme assis, Fou de Beyrouth, Oum, et L'Insoumise de Gaza, traduits en plusieurs langues. Co-scénariste du film de long-métrage (en cours de production) de Yolande Zauberman, " Golda et l'Amant palestinien " inspiré de l'un de ses livres, il a participé à un film documentaire de la même réalisatrice, " Would you have sex with an Arab ?", tourné en Israël en 2011. Tout au long de l'année 2017, il a tenu une chronique hebdomadaire dans l'émission Neo Geo sur radio Nova, " Les histoires de l'oncle Sélim ".
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L'insoumise de Gaza
Asmaa Alghoul, Sélim Nassib
- Calmann-Lévy
- Documents, Actualités, Société
- 9 Novembre 2016
- 9782702154915
Que devient une fille de Gaza qui grandit à l'ombre d'un oncle responsable important des services de sécurité du Hamas à qui elle s'oppose violemment ?
Que devient-elle quand des soldats israéliens font régulièrement irruption au milieu de la nuit pour obliger son grand-père et d'autres vieillards à sortir en pyjama effacer les graffitis que des jeunes ont tracé sur les murs ?
Que devient-elle avec un père musulman libéral aimant la lecture, un grand-père bienveillant qui la cache sous son édredon, dans une société dominée par l'enfermement, la corruption, le machisme, mais aussi par une incroyable humanité ?
Elle écrit pour vider ce trop-plein de sentiments contradictoires, elle dresse sur un ton à la fois joyeux et grave le portrait sensuel d'un pays natal passionnément aimé, devenu au fil des ans chaudron des guerres et des intégrismes.
Écrivaine, voilà ce qu'elle devient.